Oui sur la photo c'est bien le grand-père. Il est né en 1926, il avait un CAP de serrurier, a fait de petits boulots, et après la guerre, il a tenu une sorte de bar baraque sur le mail à Orléans, avant de prendre un bar en dur en 1954, et c'est là que parmi ses clients il y en a un qui lui a présenté ce qu'étaient les flippers et les bowlings mécaniques. C'est comme ça qu'il s'est lancé en 1968. Comme l'électronique c'était pas forcément son fort, il y avait un ou deux dépanneurs, et des gens qui dépannaient les cartes, plus ou moins bien. Il y a 30 ou 40 ans, c'était minimum un tour par semaine à Paris, notamment chez Paris-New-York rue Victor Méric à Clichy, ou chez Bally France à Saint-Ouen. Quand j'étais gamin, c'était le folie de voir toutes ces machines qui sentaient le neuf dans les show-room. Aujourd'hui, on les retrouve en piteux état, et elles sentent le vieux.
Chez Paris-New-York, certains flippers passaient directement du poids-lourd aux fourgons des exploitants, sans passer par la case dépôt. Même les flippers les plus abjects pouvaient être achetés en double tellement ça tournait. Effectivement, il y a 30 ou 40 ans, l'ambiance était parfois un peu plus tendue, pour ne pas dire chaude, mais cette époque est révolue, heureusement. Surtout à Paris ... Ici, il y avait beaucoup de concurrence également, et certains étaient prêts à baisser leur froc ou se prostituer en filant 60 % juste pour avoir la place. C'est totalement terminé aujourd'hui, et même si on est seuls sur la zone de chalandise, on fait le boulot correctement.
Quand je dis qu'il faut être prêt à faire des kilomètres, c'est pas une vue de l'esprit. J'ai deux bonnes places de flipper à Vierzon (si, si). J'y ai un Ghostbusters et un Scared Stiff. Il y a deux semaines, j'ai fait deux aller/retour dans la journée parce que la panne qui s'est déclarée l'après midi (fil de cassé sur un switch du GB) n'était pas survenue le matin quand j'y suis allé, forcément. J'y suis retourné vendredi pour un décor cassé qui bloquait un couloir sur le scared stiff, et ce matin encore parce que la vis de la liaison mécanique du plongeur était dévissée à cause d'un trou ovalisé ... Donc on fait des bornes, même si on est de bonne foi quand on révise la machine ! Or entre temps, j'avais pris une location de baby-foot à côté d'Orléans, donc, on commence par livrer à 8h30 le baby-foot, je rentre chez moi laborieusement (bouchons, ralentissements ...) pour changer de véhicule, je fais mon aller/retour, et je rentre. Parfois mon historique de géolocalisation sur Google Maps me fait peur.
C'est là aussi qu'on se fait avoir sur des étourderies. À Orléans, j'oublie de remettre les billes dans le jeu une fois la réparation terminée. Ou je me tape un aller/retour à Saint-Florent-sur-Cher juste parce que j'ai oublié de brancher la caméra sur ma Dartslive2, parce que j'ai pas fait attention alors que je discutais ... Donc même en se donnant les moyens, il y a un proportion incompressibles de kilomètres, surtout si les places sont éloignées. J'ai une Dartslive 2 à Barjouville (au bowling) au plus loin au nord, et le plus au sud, une Dartslive/Baby-foot/billard à Saint-Amand-Montrond dans un pub. Il y a donc 232 km entre les deux. Faut pas se rater. Donc c'est évident que celui que ça gonfle de faire des bornes pour faire des petites pannes, ça va pas être pour lui. Si je trace un polygone dont les extrémités sont mes places les plus éloignées, la zone couverte est de 10 000 km² ...

C'est sûr que quand on traverse la campagne du Cher l'hiver, sous la pluie, le vent, qu'il faut décharger un double conduite Sega pour en charger un autre à moitié sous la pluie (les conditions de chargement ne sont jamais idéales aux abords de places : stationnement, revêtement au sol dégradé, camion en pente ...), qu'il y a du vent, que ça pèse 500 kg, qu'il fait nuit de bonne heure, qu'on se gèle parfois à l'atelier, et j'en passe, il y a des moments moins bons que d'autres. Mais on en revient aussi au point que si c'était si facile, tout le monde aurait continué à le faire. Il y a de moins en moins de gens qui veulent accepter d'avoir à se fader aussi bien des travaux d'électronique assez minutieux que de la manutention à 500 kg ou 1 tonne à force de bras dans une même journée

Zis is how ve say gutbye in Germany.